Le président américain Donald Trump est déterminé à obtenir un cessez-le-feu rapide. De leur côté, les Russes arrivent à la table des négociations avec des conditions jugées irréalistes par les Européens.
De nouveaux pourparlers. Une réunion entre Américains et Russes est organisée ce lundi 24 mars en Arabie saoudite pour de nouvelles discussions concernant la guerre en Ukraine. L’objectif est d’instaurer une trêve partielle dans le pays, après plus de trois ans d’offensive russe.
Cette rencontre intervient alors que Donald Trump, qui avait promis de régler le conflit en 24 heures, a rebattu les cartes géopolitiques en entamant un rapprochement avec Vladimir Poutine.
Si l’émissaire spécial du président américain Steve Witkoff a affirmé ce dimanche que de “vrais progrès” étaient attendus ce lundi et que, selon lui, Vladimir Poutine “veut la paix”, le porte-parole du Kremlin a d’ores et déjà tempéré les attentes autour de ces nouveaux pourparlers.
“Il s’agit d’un sujet très complexe et il y a beaucoup de travail à faire”, a fait valoir Dmitri Peskov à la télévision russe, estimant que ces négociations seraient “difficiles”.
“Nous n’en sommes qu’au début”, a-t-il encore dit.
Encore loin d’un cessez-le-feu général
Pour Kiev et Washington, l’objectif final est d’obtenir un cessez-le-feu complet. L’Ukraine s’est, en effet, déjà dite “prête” à un cessez-le-feu “général” et sans conditions. Selon des sources de l’agence de presse Bloomberg, les États-Unis espèrent y parvenir d’ici le 20 avril.
Toutefois, un tel accord de trêve semble encore bien loin. Lors des derniers échanges, la Russie a émis de nombreuses conditions à ce potentiel cessez-le-feu, dont certaines avaient été jugées irréalistes et inacceptables par Kiev et ses alliés occidentaux, notamment européens.
Vladimir Poutine avait notamment exigé la fin du “réarmement” de l’Ukraine et l’arrêt de l’aide occidentale à Kiev, laissant ainsi penser que le dirigeant russe n’était pas prêt à la paix et n’avait pas renoncé à ses objectifs de guerre, à savoir la démilitarisation de l’Ukraine, le changement de régime dans le pays ou encore l’annexion, à minima, des territoires de l’Est.
Des négociations autour de la mer Noire
Par conséquent, les négociateurs revoient pour l’heure leurs attentes à la baisse. La Maison Blanche a ainsi affirmé que l’objectif des négociations est de parvenir à un cessez-le-feu maritime en mer Noire, permettant la libre circulation des navires.
Le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a affirmé que “le principal” sujet de discussion avec les Américains serait “la reprise” de l’application de l’accord céréalier en mer Noire, ne mentionnant pas un éventuel engagement concernant la suspension des combats, limité ou sans conditions.
Cet accord, en vigueur entre juillet 2022 et juillet 2023, avait permis à l’Ukraine d’exporter ses céréales, vitales pour l’alimentation mondiale et pour l’économie du pays, malgré la présence de la flotte russe dans la zone. La Russie s’en est ensuite retirée.
Un arrêt des combats en mer Noire est toutefois un processus qui pourrait bénéficier plus à la Russie qu’à l’Ukraine. Sur ce front, l’armée ukrainienne a clairement pris le dessus sur son ennemi. Les victoires de l’Ukraine lui ont permis de lancer en 2023 un corridor dans la mer pour acheminer ses céréales et autres produits agricoles.
À partir d’un accord de cessez-le-feu en mer Noire, l’émissaire américain Steve Witkoff a estimé qu’on “se dirigera naturellement vers un cessez-le-feu total des tirs”.
La question des enfants ukrainiens enlevés
Outre la mer Noire, le conseiller à la sécurité nationale de la Maison Blanche, Mike Waltz, a déclaré ce dimanche sur la chaîne CBS que ces équipes discuteront également de la “ligne de contrôle” entre les deux pays, parlant de “mesures de vérification, de maintien de la paix, de gel des lignes là où elles se trouvent”.
Depuis la reprise des contacts entre la Russie et les États-Unis, la question brûlante de l’intégrité territoriale de l’Ukraine n’a peu ou pas été évoquée. Donald Trump s’était déjà dit prêt à parler de “partage” entre l’Ukraine et la Russie, qui réclame cinq régions ukrainiennes dont la Crimée, annexée en 2014.
Mike Waltz a ajouté que des “mesures de confiance” sont à l’étude, notamment le retour des enfants ukrainiens enlevés par la Russie. Comme le rappelle Reuters, Kiev a qualifié de crime de guerre l’enlèvement de dizaines de milliers de ses enfants qui ont été emmenés en Russie ou dans des territoires occupés par la Russie sans le consentement de leur famille, ce qui correspond à la définition du génocide donnée par les Nations unies, rapporte Reuters. De son côté, l’armée russe assure qu’elle “protège” les enfants vulnérables de la zone de guerre.
Les combats se poursuivent
L’un des objets de ces nouvelles négociations sera également l’arrêt temporaire des frappes sur les infrastructures énergétiques. Centrales thermiques, réseaux de distribution… Depuis le début de l’invasion, la Russie tente d’affaiblir le système énergétique ukrainien. Des coupures de courant sont régulières à travers le pays.
Lors de l’appel entre Donald Trump et Vladimir Poutine mardi dernier, le dirigeant russe s’était dit prêt à respecter une telle trêve durant 30 jours.
Trois jours plus tard en revanche, Kiev et Moscou s’accusaient mutuellement d’une attaque contre une station russe de gaz, dans la région de Koursk, partiellement occupée par les forces ukrainiennes.
Outre les sites énergétiques, sur le terrain, les combats continuent par ailleurs de faire rage. Les autorités ukrainiennes ont fait état dans la nuit de dimanche à lundi de frappes touchant les régions de Kiev, Kharkiv et Zaporijia, faisant plusieurs blessés, au lendemain de bombardements meurtriers sur la capitale.
L’armée ukrainienne a aussi annoncé ce dimanche avoir repris le petit village de Nadia, dans la région orientale de Lougansk, un succès rare pour les militaires ukrainiens dans cette zone quasi entièrement contrôlée par la Russie. Les forces russes ont elles déclaré s’être emparées de la localité de Sribné, également dans l’est de l’Ukraine.
“Celui qui a déclenché cette guerre doit la finir”
Volodymyr Zelensky a appelé ce dimanche à “pousser” Vladimir Poutine à mettre fin à l’invasion en cours depuis plus de trois ans. “Quels que soient nos échanges avec nos partenaires, nous devons pousser Poutine à donner un véritable ordre pour arrêter les frappes: celui qui a déclenché cette guerre doit la finir”, a déclaré le président ukrainien.
“Il est clair pour tout le monde que la Russie est la seule à faire durer cette guerre”, a-t-il insisté.
Heorhii Tykhyi, porte-parole du ministère ukrainien des Affaires étrangères, a déclaré que les négociateurs ukrainiens et américains devaient “clarifier les modalités, les nuances des différents régimes de cessez-le-feu possibles, comment les surveiller, comment les contrôler, en général, ce qui est inclus dans leur portée”. Une réunion a d’ailleurs eu lieu ce dimanche, jusqu’à tard dans la nuit, à Ryad, en Arabie saoudite, entre Ukrainiens et Américains.
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